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Le Merveilleux Max Walter

André Pieyre de Mandiargues

Difficile, très difficile, en vérité, est la distinction entre ce qui dans l'art est merveilleux et ce qui n'est que fantastique. Plutôt que d'argumenter, il faut avoir recours aux exemples. Celui qui de mon point de vue s'impose avant tout autre dans l'époque actuelle est le fait de l'œuvre peinte, dessinée, gravée ou collée de Max Walter Svanberg, car il n'est rien dans les travaux de ce grand inspiré qui ne soit purement éblouissant pour le spectateur et qui ne témoigne d'un éblouissement semblable du créateur. Svanberg est un illuminé qui nous illumine (et c'est à juste titre qu'il choisit naguère les poèmes de Rimbaud comme sujets de ses illustrations). Une illumination est défine en quelque sorte par ce que rien de bas n'y peut entrer sans la détruire. Ainsi les bizarreries les plus extrêmes mises en image par Max Walter ne quittent jamais les plus hauts et les plus neigeux sommets de l'esprit. L'érotisme, parfois furieux ou frénétique, de ses ravissantes créatures féminines (les plus jolis monstres qui soient sortis de l'éternel rêve de tous les hommes) est absolument dépourvu de quoi que ce soit de sale ou de graveleux. Le théâtre érotique de Max Walter est un tréteau qui ne supporte que des filles de procelaine éclairées par la lune autant que par le soleil de minuit, et si le désir est en nous tellement fort, quand nous les regardons, d'être un peu blessé par leurs papillonnants jeux, c'est parce que le même désir fut assurément ressenti par le peintre quand il organisa le spectacle.

N'ai-je pas déjà laissé entendre que je considérais l'art de Max Walter commes le très pur miroir du songe de l'artiste? Et n'est-ce pas à une pareille idée que nous pouvons attribuer l'émouvante impression de fragilité qu'il nous laisse, quand nous nous penchons vers lui avec une crainte irraisonnable de le voir se casser ou disparaître au moindre signe de vulgarité dans l'entourage de sa féerie cristalline? Ainsi les ailes splendides de papillons, si un doigt grossier les touche, vont en poussière; ainsi la grâce des lépidoptères est le meilleur terme de comparaison naturelle que nous puissons trouver à l'œuvre et au caractère de Max Walter Svanberg. Que cet homme soit remercié d'être tel et de nous avoir dévoilé son beau songe!